PubGazetteHaiti202005

L’ULCC demande au parquet de P-au-P de mettre l’action publique en mouvement contre Jemley Jean-Baptiste, ex DG de l’ONA 

Jemley Jean Baptiste, ex DG ONA

L’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC) a rendu public son rapport d’enquête sur les soupçons de corruption entourant les contrats de location de véhicules conclus par l’Office Nationale d’Assurance-Vieillesse entre juillet 2021 et février 2023. Après analyse des faits, l’institution demande au parquet de Port-au-Prince de mettre l’action publique en mouvement contre l’ancien Directeur Directeur Général Jemley Jean-Baptiste « pour abus de fonctions et prise illégale d'interêt. »

Cette enquête avait été diligentée suite aux soupçons de corruption entourant les contrats de location de véhicules conclus par l'Office National d'Assurance-vieillesse (ONA) durant la période de juillet 2021 à février 2023. L'objectif principal de cette enquête consistait à conduire des investigations sur les contrats de location de véhicules exécutés par l'ONA durant ladite  période.


Par conséquent, la Commission a sollicité et obtenu de l'ONA la copie des contrats de location des véhicules passés sous l'administration de  Jemley Marc JEAN BAPTISTE durant la période allant de juillet 2021 à février 2023 ainsi que différentes pièces justificatives, l'inventaire global du parc automobile de l'Institution, les budgets et les plans annuels de passation des marchés publics des exercices fiscaux 2020-2021, 2021-2022 et 2022-2023 validés par la Commission Nationale des Marchés Publics (CNMP). 


Après l’analyse des documents, l’ULCC dit avoir découvert l'existence de contrats de location de véhicules passés entre l'ONA et de tiers et ceci sous l’administration de Jemley Marc JEAN BAPTISTE. Pour ces locations, le Directeur Général d’alors, selon l’ULCC, a dépensé la somme de Soixante et un millions deux cent quatre vingt quatorze mille huit cent vingt trois gourdes et 74/100 (61,294,823.74).

Selon l’ULCC, pour se justifier, Jean Baptiste, lors de son audition a reconnu l'existence de ces contrats de location de véhicules mais a déclaré que la pauvreté du parc automobile de l'institution a contraint la Direction Générale à demander à la Direction administrative d'assurer le suivi pour la location de certains véhicules devant répondre aux besoins de l'Institution.

Dans l’administration publique, ces genres d’affaires doivent respecter la règle de la passation de marché public conformément aux prescrits de la loi. Toutefois, selon l’ULCC, aucune règle minimale n'a été respectée.


« Les marchés de location de véhicules conclus par l'ONA, de juillet 2021 à février 2023, ne respectaient pas les normes de passation des marchés publics. Sur l'exercice fiscal 2021-2022, entre octobre 2021 à septembre 2022, l'ONA avait conclu des marchés pour environ Quarante millions neuf mille quatre cents gourdes et 00/100 (40,009,400.00 gdes) », révèle le rapport qui précise que « ce montant dépassait largement le seuil d'intervention de la CNMP fixé à 25,000,000.00 de gourdes par l'Arrêté du 25 mai 2012 en vigueur jusqu'au 30 mai 2022, et à 16,000,000.00 de gourdes par Arrêté pris en date du 1er juin 2022, en ce qui concerne les seuils des marchés de fournitures. »


Par rapport à cet etat de fait et étant donné que ce marché était « sous le contrôle a priori de la Commission Nationale des Marchés Publics (CNMP), comme à l'accoutumée MJemley Marc JEAN BAPTISTE avait morcelé, saucissonné le marché et conclu des contrats directement avec certaines entreprises »

Autres aspects aussi, l’ULCC constate que les contrats conclus entre l'ONA et les différentes entreprises de location de véhicules n'avaient pas été approuvés par la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSC-CA). 

Pour l’ULCC, il s’agit d’un manque flagrant et constitue une grave violation des dispositions de l'article 200-4 de la Constitution et celles des articles 131, 148 et 153 du décret du 17 mai 2005 portant organisation de l'Administration centrale de l'État. «  De ce fait, M. Jemley Marc JEAN BAPTISTE avait décidé sciemment de violer la législation haïtienne en cette matière », estime l’ULCC.

Un autre fait troublant est que l’ULCC a  constaté que certains véhicules loués par ces entreprises avaient différents propriétaires. C’est le cas d’un véhicule "TOYOTA PRADO" blindée immatriculée AA-22977 louée par la compagnie EBEN-EZER RENT-A-CAR pourtant inscrite au nom de Roody TRÉZIL identifié au NIF: 004-540-580-9 et la "MAZDA BT50" immatriculée LO- 00061 louée par la compagnie VP ARMORED SERVICES RENT A CAR, mais enregistrée au nom de FIRST STEP CAR RENTAL.

« Durant cette période, pour ces véhicules, M. Jemley Marc JEAN BAPTISTE avait décaissé la somme de Vingt-deux millions huit cent cinquante cinq mille huit cents (22,855,800.00) gourdes », révèle le rapport.

Les véhicules loués par l'ONA n'ont pas tous des plaques d'immatriculation Location. Certains portaient des plaques privées. Aussi, l'ONA n'a pas versé à la DGI les taxes prélevées sur ces contrats de location de véhicules. Faits admis par Jemley Jean Baptiste lors de son audition, toujours selon l’ULCC.

De plus, la commission d'enquête relève également que les ressources financières et matérielles de l'ONA ont été mal gérées sous la direction de Jemley Marc JEAN BAPTISTE. Ce dernier « s’est servi d’un programme dénommé < CAR PLAN » pour prendre illégalement intérêt ».

Ce programme est là pour faire bénéficier les directeurs techniques ou de rayon des véhicules financés par les fonds de l'ONA. Ce programme visait à pallier les problèmes de véhicules que confrontait l'Institution à l'époque. Jemley Jean Baptiste figure sur la liste des bénéficiaires. Il s’est adjugé un véhicule de marque « TOYOTA LAND CRUISER, modèle 2021, muni d'un blindage de niveau 6 (B6)coûtant à l'Etat haïtien au total Cent soixante mille (160,000.00) dollars américains », peut-on lire dans le rapport d’enquête. 

Selon l’ULCC, il a pris un intérêt direct alors que tous les fonds de l'ONA étaient sous son contrôle et sous sa surveillance. « De plus, il est précisé dans le préambule du contrat "CAR PLAN" que la Direction générale de l'ONA a « adopté cette disposition pour le bon fonctionnement de l'Institution, tout en sauvegardant ses intérêts » », soutient le rapport qui précise qu’il s'agit  d'un cas typique de conflits d'intérêts entre l'agent public qu'était MJEAN BAPTISTE à l'époque et les intérêts de l'ONA dont il était tenu de préserver, d'autant plus que le véhicule est financé par l'Institution. « Dans cette opération, il avait choisi de protéger ses intérêts privés aux dépends de ceux de l'Institution, en prenant illégalement un intérêt », indique l’ULCC. 

Dans la même veine, le rapport indique que les enquêteurs de l'ULCC ont pu découvrir qu'il a fait bénéficier à la Directrice générale adjointe, Stéphanie MONDESTIN et à son directeur de cabinet, Monsieur Roseman ASPILAIRE deux véhicules dans le même programme qui totalisent un montant de dix-sept millions cinq cent seize mille (17,516,000.00) gourdes.


L’unité de lutte contre la corruption accuse Jemley Jean Baptiste aussi de détournement de biens publics. Selon l’institution, Jemley Marc JEAN BAPTISTE, en occupant cette fonction ad interim, avait fait une mauvaise utilisation du parc de véhicules de l'ONA. « Tandis que l'Institution confrontait à de sérieux problèmes de véhicules, M JEAN BAPTISTE avait décidé pourtant de mettre à la disposition des agents de la Police Nationale d'Haïti (PNH)lors de la période du "peyi lok" (septembre à novembre 2022), des véhicules de l'ONA », écrit l’ULCC. 

Pour justifier son acte, lors de l’audition, Jean Baptiste a déclaré qu’il a agi ainsi suite à un «  ordre de son ministre de tutelle, M. Ricot ODNEY ». « L'affectation irrégulière en dehors de tout cadre administratif et institutionnel à la PNH durant la période de <peyi lok » des véhicules appartenant à l'ONA constitue un cas classique de détournement de biens publics imputable à M. Jemley Marc JEAN BAPTISTE. Car, le détournement résulte, au sens de la loi, d'une utilisation des biens publics à des fins étrangères », précise l’ULCC.


L’ULCC évoque des cas d’abus de fonction faits par Jemley Jean Baptiste lors de son administration. Le rapport révèle que l’ex DG avait préféré louer en nette violation de la loi des véhicules au nom de l'ONA (dont des blindés) pour des sommes exorbitantes. « A cause de ces contrats et autres actes irréguliers, le Trésor public accuse un manque à gagner d'environ soixante et un millions deux cent quatre-vingt-quatorze mille huit cent vingt-trois gourdes et 74/100 (61,294, 823.74) et de Cent soixante Mille dollars américains et 00/100 (160,000.00 USD) en passant illégalement des marchés publics, en prenant illégalement un intérêt dans les opérations de l'Institution et en procurant aux entreprises co-contractantes des avantages indus au détriment de l'ONA », fait remarquer l’ULCC.


Par conséquent, l’ULCC recommande que l’action publique soit mise en mouvement contre l’ancien Directeur Général Jemley Marc JEAN BAPTISTE « pour détournement de biens publics, abus de fonction, passation illégale de marchés publics, prise illégale d'intérêts ».

 

 

 

Par Daniel Zéphyr

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