A la 79ème session ordinaire de l'Assemblée Générale des Nations Unies à New York, Edgard Leblanc Fils, Président du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) a pris la parole ce jeudi au nom d’Haïti. Dans son discours, Edgard Leblanc a appelé à la solidarité agissante de la communauté internationale et à la restitution de la dette de l’indépendance, marchant ainsi sur les traces de l'ex président Jean Bertrand Aristide qui fut le premier à produire cette demande jugée historique.
Faisant éloge du passé héroïque d’Haïti, l’histoire que regorge la première république noire au monde, Edgard Leblanc, dans son discours, a peint un tableau sombre de la situation en Haïti. Avec le poids de cette histoire et l'espoir d'un avenir meilleur, en tant que porte-voix d’Haïti, Edgard Leblanc a appelé à la solidarité́ agissante de la communauté́ internationale.
Le président Leblanc reconnait le soutien apporté par la communauté internationale en ces temps de crise. « Par cette coopération continue et mieux adaptée, Haïti se remettra plus forte, plus résiliente et engagera, confiante, sa marche assurée vers le développement et le progrès », croit M. Leblanc.
Edgard Leblanc qui dit penser aux Haïtiens qui ont dû fuir le pays pour aller vers des cieux plus cléments surtout ceux de Springfield, dans l’Ohio, aux Etats-Unis, a souligné la longue histoire d'amitié́ et de solidarité́ réciproque entre nos deux nations, depuis la participation à la bataille de Savannah en 1779.
« La participation active des immigrés haïtiens à différents niveaux de la vie des États-Unis est tangible et significative », affirme Leblanc. « À cet égard, les passions qui émergent naturellement lors d'une campagne électorale ne devraient en aucun cas servir de prétexte à la xénophobie ou au racisme dans un pays tel que les États-Unis, une nation forgée par des immigrants de toutes origines et qui s'est érigée en modèle de démocratie à l'échelle mondiale », renchérit-il.
Le Président du Conseil Présidentiel de Transition Edgard Leblanc Fils a pointé du doigt la communauté internationale dans l’échec d’Haïti à se relever. Soulignant que la résolution des problèmes d’Haïti repose avant tout sur ses épaules, Edgard Leblanc croit que cette responsabilité n’incombe pas seulement à Haïti.
« La communauté internationale, les Nations Unies, les puissances étrangères qui ont souvent joué un rôle décisif dans l’histoire d’Haïti ont également une part essentielle dans ce processus de restauration de la paix, de redressement économique, de développement institutionnel et d’établissement d’un Etat de droit », affirme Leblanc qui estime que l'échec d'Haïti à se relever n'est pas seulement celui d'une nation.
« Il traduit un échec collectif, une incapacité́ mondiale à respecter pleinement les principes de solidarité́, de justice et de coopération internationale », dit-il.
Du point de vue sécuritaire, le tableau sécuritaire présenté par Edgard Leblanc Fils est alarmant. Cette situation affecte tous les aspects de la société haïtienne, fragilise les institutions, paralyse l’économie, mine l’espoir de lendemain meilleur, estime l’ancien president de l’Assemblée Nationale.
Selon les chiffres présentés par Leblanc, cinquante pourcent (50%) de l’effectif des gangs de la région de la capitale sont constitués d’enfants et d’adolescents filles et garçons. « Le rétablissement de la sécurité́ nationale est une priorité́ absolue pour les autorités haïtiennes. Elles sont pleinement engagées à mettre fin à cette spirale de violence et à restaurer l’ordre, afin de garantir à chaque citoyen, à chaque citoyenne le droit fondamental à la sécurité », a assuré Leblanc.
Par rapport à la situation, Edgard Leblanc remercie le Conseil de Securite de l’ONU d’avoir autorisé le déploiement de la Mission Multinationale d'Appui à la Sécurité (MSS) à travers la résolution 2699. M. Leblanc estime que la Mission et les forces de l’ordre ont montré des résultats tangibles sur le terrain même si « beaucoup reste à faire »
Edgard Leblanc Fils a aussi plaidé en faveur de l’amorcement d’une réflexion sur la transformation de la Mission de Soutien à la Sécurité (MSS) en une Mission d’Opération de Maintien de la Paix (OMP) sous mandat de l’Organisation des Nations Unies. Il reconnait, toutefois, que des missions de maintien de la paix a laissé un héritage lourd de conséquences.
« Des allégations de violations graves des droits humains, y compris des abus sexuels, ont ébranlé la confiance du peuple haïtien. L'absence de poursuites et de réparations pour les victimes a renforcé un certain sentiment d'impunité, minant ainsi les efforts de reconstruction », rappelle Leblanc.
« Cette transformation permettrait non seulement de sécuriser un financement plus stable et d'élargir les capacités de la mission, mais également de renforcer l'engagement des États membres en faveur de la sécurité en Haïti. Je suis convaincu que ce changement de statut, tout en s’assurant que les erreurs du passé ne se répètent pas, garantira le plein succès de la Mission en Haïti », croit Leblanc.
Edgard Leblanc a aussi dénoncé l’injustice historique dont Haïti a été victime et qui a retardé son développement. « En 1825, à peine 21 ans après avoir gagné sa liberté au prix d’une lutte héroïque, Haïti a été contrainte de payer une dette colossale à la France, pays colonisateur, en échange de son indépendance », rappelle le Président du CPT, estimant que « cette (rançon) imposée sous la menace, a siphonné les ressources de la jeune nation, la plongeant dans un cycle infernal d’appauvrissement dont elle peine toujours à sortir ».
Dans le contexte d’aujourd’hui où plus que jamais l’attention est portée sur les efforts pour restaurer sans délai la sécurité et répondre aux immenses besoins humanitaires en Haïti, M. Leblanc estime important d’attirer l’attention de l’Assemblée sur les séquelles du passé colonial et des rançons payés à certaines puissances qui ont largement hypothéqué le développement d'Haïti. « Il n’est pas sans intérêt de rappeler qu’Haïti a été le seul pays à avoir payé pour son indépendance obtenue pourtant dans le feu et le sang », souligne Leblanc.
« A la veille du bicentenaire de cet événement inédit dans l’histoire du monde, n’est-il pas venu le moment de la restitution des montants consentis ?», s’est demandé Leblanc.
« Nous demandons la reconnaissance d'une dette morale et historique et la mise en œuvre de réparations justes et appropriées qui permettront à notre peuple de se libérer des chaînes invisibles de ce passé injuste », exige Leblanc qui marche sur les traces de l’ex président Jean Bertrand Aristide ayant formulé le premier cette même demande au cours de son deuxième mandat. Sa démarche a été boycottée par l'opposition, la société civile, les étudiants et les médias regrouppés au sein du groupe des 184.
Par ailleurs, le Président du CPT a appelé à l’union des forces dans l’objectif de bâtir un avenir commun. « Haïti, cette terre qui a offert au monde un symbole de liberté inébranlable et qui a aidé plusieurs nations à se libérer du joug du colonialisme barbare, ne cherche pas la charité, mais la justice, le respect de sa dignité et de son droit à une existence digne et prospère », a déclaré Leblanc sous les ovations du public.
Par: Daniel Zéphyr
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